lundi 22 février 2010

Barça ou Barre ça !




La dernière machine à coudre de mon atelier vient de trouver acquéreur au marché Colobane à un prix vraiment bas ; Cependant je n’ai aucun regret car ce qui m’attend est plus agréable.


Je viens de rassembler les 650.000Fcfa représentant la caution à donner à « Grand Ndandité » pour faire avec lui le voyage vers l’Espagne, à bord de sa …pirogue.


En remettant le pactole à « Grand Ndandité », j’ai eu droit, de sa part, à un discours sur la chance que j’ai de faire ce voyage :


« Boy sa affair bakhna ! Tu verras, une fois en Espagne. Tu seras riche comme Crésus ; beaucoup d’euros dans les poches. Tu reviendras un jour au pays et on te respectera ; Tu auras une belle maison, une grosse cylindrée… et même la fille qui te refuse aujourd’hui, se mettra à genoux devant toi sinon ses parents la renieront !


Cependant motus et bouche cousu sur ce voyage ; Rendez vous demain comme convenu à 4 Heures du matin, à la baie de Soumbédioune ! »


Il termine son discours en me tapotant les épaules d’un air fier : « Euy sama Modou Modou bi » !


Je sortis de chez lui, l’air pensif.


Pourquoi, lui qui dit avoir fait ce voyage plusieurs fois, n’est-il jamais resté ?


La nuit, je ne dors pas ; je songe ; je me vois déjà dans les rues de Barcelone, bien sapé et roulant en décapotable ; Dans ma tête, j’ai fini de raser et de transformer notre maison familiale en un immeuble bien en vue dans le quartier ; j’ai même inscrit devant la porte sur du marbre « Villa Mbengue ».


Je ne dis mot à personne ; même à maman qui sans nul doute m’aurait interdit de braver l’océan ; je suis son unique fils !


A 2 heures du matin déjà, j’étais prêt ; Dans mon sac à dos j’ai mis un pull over, un blouson, du couscous, du lait en poudre, du sucre…une tasse et une cuillère.


La photo de mon marabout autour de mon cou sera là pour me protéger des mauvaises surprises.


Sur place à Soumbédioune, nous sommes vingt à prendre place dans la pirogue ; inutile de vous dire que nous sommes à l’étroit.


L’on se salue et l’on prie chacun dans son coin ; Certains d’entre nous sortent de leur sac des bouteilles remplies de « safara » et s’enduisent le visage et les bras avec cette eau bénite.


« Grand Ndandité » prend la parole :


« Mes amis, nous allons faire le voyage ensemble et je vous dit tout de suite que ce ne sera pas de tout repos. Que ceux qui risquent de chialer rentrent chez eux sans tarder car nous ne rebrousserons pas chemin. Prêt pour le départ ?! »


Oui !!!! Lui répondîmes tous à l’unisson !


On chante et on discute tranquillement ; la pirogue continue inexorablement à s’enfoncer dans la gueule de l’océan et Dakar s’éloigne de nous.


Sans nous en rendre compte, la nuit venait de tomber et nous étions déjà très loin. Il faisait froid ; très froid même. Je pensais à ma mère, inquiète. Nous ne parlions plus de peur d’être entendus par les génies peuplant le ventre de l’océan ; nous n’osions même pas dormir.


Les petites lueurs du matin apparaissent faisant revenir u peu de clarté et de sérénité dans nos cœurs et nos esprits jusque là occupés par la peur.


Coup de théâtre ! Deux passagers sont là allongés, raides morts ; peut être du froid de la nuit passée.


Nous nous regardons. Que faire ?


Même « Grand Ndandité » avait perdu son courage légendaire ; il avait les yeux hagards.


Tout d’un coup, comme revigoré par je ne sais quoi, il prit la parole :


« Les amis ! Ces gens sont morts parce que leur heure a sonnée ; même s’ils étaient restés à Dakar, ils allaient mourir. Aidez-moi à les jeter à l’eau car si on les laisse avec nous l’odeur risque de nous tuer. »


Aussitôt dit aussitôt fait. Les corps sont jetés dans l’océan sans aucune prière mortuaire pour le repos de ces âmes qui étaient à la recherche de conditions meilleures.


Seulement le « Grand » n’a pas dit à tout le monde que si ces hommes étaient restés à Dakar auraient eu un enterrement digne d’un humain et ne seraient pas aujourd’hui le festin des requins.


Bref ! Moi j’étais là assis, n’en pouvant plus. Je voulais rentrer et je n’aurai même pas réclamé mon argent.


Qui va me ramener sur la terre ferme ? Personne !


Je me rappelle qu’on m’avait dit que celui qui récite la sourate « Lahat Jakoum » ne connaitrait pas la mort ce jour là. Punaise ! Pauvre de moi ! je ne l’ai pas apprise et au fond de moi je regrette de n’avoir pas maîtriser le coran ; je suis allé à l’école coranique comme beaucoup de mes compatriotes mais je ne sais réciter que trois ou quatre sourates pour mes prières obligatoires. Mais qu’à cela ne tienne , je me mets à murmurer le titre « Lahat jakoum. Lahat Jakoum… ».


Troisième matinée, quatre cadavres subissent le même sort que les premiers : être le festin de requins. Nous ne sommes plus que quatorze personnes affamées, fatiguées, malades, inquiets…


On commençait à tourner en rond. Pourquoi il n’y a pas de panneaux d’indication pour nous permettre de retrouver notre chemin ? Du retour nak ; pas de l’Espagne car je n’en veux plus ; Je ne veux plus être Modou Modou !!! Je veux rentrer !!!!


Euréka ! Un chalutier nous a retrouvé et nous a repêchés. J’ai voulu danser, sauter de joie mais je n’en avais ni la force physique, ni la force morale. Nous sommes acheminés à la frontière espagnole et abandonnés entre les mains des policiers.


Ils nous servirent à manger, du lait chaud et des médicaments. Nous n’avions aucun papier sur nous et à la question : d’où venez vous ? nous répondons « on ne sait pas » et les seuls qui osaient dire du Sénégal ajoutaient qu’ils sont des homosexuels persécutés au pays de la Téranga et qu’ils sont venus chercher l’asile.


Nous fîmes une semaine dans ce centre de détention et de transit avant de recevoir un papier qui nous permet d’entrer dans le territoire espagnol.


Barça ! Barça !


Il fait froid ici mais ce n’est pas grave « Ku beug akara dangay gnémé kani ».


Dans cette ville j’y ai vu des africains faire des boulots qu’ils n’accepteraient jamais même pour tout l’or du monde de faire chez eux, au pays : balayer les rues( Dieu sait que les nôtres sont plus sales), essuyer des vitres, s’occuper de vieux malades, jouer au chat et à la souris avec les policiers…


J’y ai rencontré des voleurs, des arnaqueurs, des agresseurs dans mon peuple.


Je reconnais avoir aussi fait la connaissance d’africains dignes, travailleurs, brillants étudiants…


Dans les chambres, une kyrielle d’occupants et la cuisine se fait à tour de rôle le dimanche.


L’argent y est chèrement gagné ! Comment font-ils ces Modou qui viennent en vacances au pays pour dépenser tout cet argent et rentrer en Europe ?


Tous ces efforts que l’on déploie pour développer ce pays auraient permis de mettre le nôtre définitivement sur orbite. Ils te diront tous qu’au pays on ne paie pas ; ils l’appellent le bled !


Et si Serigne Touba avait accepté ces choses d’ici bas, serions nous là récolter les fruits de son seul travail ? Je pense que non !


Il faut qu’une génération accepte de se sacrifier pour celle future.


Lorsque le pays européen prend des risques pour son développement avec l’aide des immigrants, ceux-ci restent toujours de simples outils économiques avec ou sans papier, de simples marginaux.


C’est une illusion de croire qu’un noir africain vivant et travaillant en France, par exemple, appartient à la mémoire du peuple français, partage les mêmes racines historiques avec le peuple français, fait partie de la conscience intellectuelle du peuple français. Il peut tout avoir : travail, position, fonction, considération, honneur, etc… ; mais il ne sera jamais l’enfant du pays dans la conscience française. On peut avoir, par assimilation, le statut de français ou française. Mais il y’a une différence profonde entre « être français » et être « considéré comme français » par assimilation. Les littératures produites par des africains en langue française relèvent de la francophonie et non de la littérature française nationale.


Je ne suis pas pour un retour définitif des émigrés mais pour un coup d’œil incessant sur le rétroviseur, pour une prise de conscience des problèmes que traverse le pays d’origine.


Restez où vous êtes si vous y trouvez votre compte mais répondez aussi à l’appel de la mère patrie ; pas seulement en envoyant de l’argent aux parents ( chose importante car participant au maintien de l’équilibre dans les familles) mais en participant à la vie politique, économique et sociale du « bled ».


Sursaut, décision, risque, prise de conscience, ambition pour un meilleur avenir, lutte persévérante, telle est ce que le peuple sénégalais, africain, attend de vous car l’urgence et la nécessité se font sentir.


Basta ! N’attendez plus !



Ly Souleymane


77 6516505


Julesly10@yahoo.fr


www.julesly.blogspot.com







jeudi 11 février 2010

Mon Rêve

J’ai rêvé de plusieurs camps qui s’affrontent pour devenir Président de la République ; chacun nourrissant l’intime conviction qu’il est né pour diriger ce pays ; qu’il est mieux né que les 11.999.999 autres sénégalais.

J’ai vu le « Tassaro » du Benno en plusieurs lambeaux : une multitude de candidats, chaque dirigeant de parti se disant que c’est le moment où jamais. D’aucuns savent qu’ils ne gagneront pas mais veulent compter au moment des négociations pour le deuxième tour ; hypothétique deuxième tour !

Et si ce « Tassaro » est jusque là retardé c’est parce que chacun croit ferme que le consensus se fera autour de sa propre personne.

J’ai rêvé d’une implosion au sein du PDSL avec nombreux de ses ténors qui iront s’allier avec les candidats de l’opposition qu’ils sentiront potentiels vainqueurs : éternelle transhumance !

Les élections seront controversées, les résultats contestés et il s’en suivra des appels au calme tous azimuts.

Je vois des cadavres jonchés les rues ; des jeunes, des enfants, des femmes, des hommes, des vieilles et des vieux.

Les affrontements feront rage et les forces de l’ordre débordées multiplieront les bavures.

J’ai vu des leaders qui se barricadent chez eux, suivant, un verre à la main, leurs militants s’affronter, investir les rues de Dakar à Fongholembi.

Des femmes en pleurs, cheveux au vent, courent dans tous les sens pour retenir leurs progénitures déchainées, envoyées au front par des dirigeants qui ont pris le soin d’envoyer leurs enfants à l’extérieur du pays et interdiction leur étant faite de fouler le sol sénégalais durant toute la période allant de la campagne électorale au retour du calme.

Je vois des conférences nationales convoquées, des opposants d’hier s’embrasser, se donner la main, se congratuler pour tous ces accords signés avec le sang des pauvres innocents.

J’ai rêvé de chefs religieux donnant des consignes de vote à leurs disciples juste parce qu’untel a dit « fii mo ko yor » ! D’autres iront même jusqu’à marchander les voix de leurs talibés moyennant des espèces sonnantes et trébuchantes.

J’ai vu des télévisions, des radios, des journaux…fermés manu militari !

Je vois d’ici des jeunes en désespoir profiter de toute cette cacophonie pour déposséder d’honnêtes citoyens de leurs biens : des boutiques pillées, des cantines visitées, des filles violées…

De l’extérieur un médiateur nommé pour faire revenir le calme se frotte les mains en se disant : « Enfin ! Le Sénégal qui fait comme la moitié de toute l’Afrique. Cette paix qui faisait leur fierté n’avait que assez duré » !

Des biens appartenant à la République, à vous et à moi, sont saccagés, incendiés… Des archives et des disques durs disparaissent !

J’ai bien rêvé que dans ce chaos personne n’y gagne et tous les sénégalais y perdent : ceux de l’intérieur comme les expatriés.

Je vois des émigrés revenir au pays en masse chassés qu’ils sont par l’Eldorado ; ceux qui ont la chance de rester sont obligés de chanter la Marseillaise à la place de notre « Pincez tous » inimitable.

Je vois l’exode prendre le chemin inverse ; des familles braderont leurs maisons en ville pour aller s’installer dans la banlieue. Les prisons refusent le monde fou de directeurs, de comptables…qui à un moment ont puisé dans la caisse commune pour assurer un toit à leur famille ; Aucun salaire de fonctionnaire moyen ne pouvant acheter un appartement à 52.000.000 FCFA ou une maison à 800.000.000Fcfa.

La ville sera laissée aux riches, aux grands bandits et aux voleurs. Le sénégalais « moyen » ne peut plus payer une seule chambre à 80.000Fcfa.

Ngiir Guentë bagna done dëgg ci nioune la dess ! (Pour que le rêve ne soit pas réalité, la balle est dans notre camp).

A bon entendeur, salam !

Ly Souleymane

Julesly10@yahoo.fr

77 651 65 05

www.julesly.blogspot.com

Sant Yalla !




Cocorico ! C’est le coq qui chante.


Dans la maison d’à coté des cris et des pleurs,


Un membre de la famille ne s’est pas réveillé.


Je ma tapote, je me pince,


Je suis bien réveillé, en vie.


Sant Yalla ! Alhamdoulilahi !


Dans la rue, je dépasse des handicapés,


Qui sur fauteuils roulants, qui avec des béquilles


Je jette un coup d’œil sur mes jambes valides


Je rends grâce à Dieu ! Alhamdoulilahi !


Des enfants sales, en haillons, pieds nus, tendant la main ;


Je pense à mon fils à la maison au milieu de ses jouets.


Diarama mon Dieu ! Sant Yalla !


Une femme, un homme :


« Mon frère, aide moi à faire bouillir ma marmite


Pour mes enfants qui n’ont pas mangé depuis hier » !


Ma pensée vers mon réfrigérateur rempli de denrées de toutes sortes


Mi yéta Allah ! Alhamdoulilahi !


Dans un coin de la rue,


Un vieux d’une soixantaine d’années,


Ivre mort, titubant est poursuivi


Par des marmots qui lui crient dessus :


« Mandikate ! Mandikate » !


Je me tourne vers mon père,


Splendidement assis sur son tapis de prière


Et jouissant du respect de tous


I give thanks to Allah! Alhamdulillah!


Sur l’avenue Ponty, des filles habillées nues,


Des canettes de bières à la main


Marchandant avec des hommes un moment de plaisir ;


Je pense à mes sœurs sagement assises dans leur maison conjugale


Sant Yalla ! Alhamdoulilahi !


Partout des guerres dans mon continent


Des hommes, des femmes, des enfants tués,


Découpés à la machette


Des cadavres jonchent les rues ;


De mon balcon,


Je jette un coup d’œil sur ma ville,


Un calme olympien y règne.


Sant Yalla ! Alhamdoulilahi !


Des sans papiers, dans des tentes précaires,


Matraqués, menottés, ramenés manu militari


Dans leur bled qu’ils fuient ;


J’ouvre mon sac, sors ma carte de séjour


Je la relie avant de la serrer fort contre moi.


Diarama Allah ! Alhamdoulilahi !


Passant devant des cimetières,


Je ne peux m’empêcher de penser…


A ceux qui sont dans ces tombes attendant…


Je me pince pour me rendre compte


Que je vie réellement


Yétéré Allah ! Alhamdoulilahi !


Douze millions de mes compatriotes


Me choisissent pour les diriger ;


Je pense à tous ces gens plus beaux,


Plus honnêtes, plus intelligents, plus éclairés que moi.


Sant Yalla ! Alhamdoulilahi !


Dans la division divine


Mon quotient n’est pas nul


Sant Yalla ! Alhamdoulilahi !


Devant le guichet de ma banque


Je pense à tous ces jeunes à la recherche d’un premier salaire.


Sant Yalla ! Alhamdoulilahi !


Je suis étudiant dans une grande université


En Europe ou aux Etats-Unis ;


Mes amis sont restés au pays,


Dans une université de soixante mille étudiants


Avec des facultés de plus cinq mille potaches.


Sant Yalla ! Alhamdoulilahi !


Chacun a quelque chose venant du Seigneur.


Nako santé Yalla ! Qu’il en remercie Dieu !



Par Souleymane Ly


Julesly10@yahoo.fr















Ma Haine !

Haine de toi qui bats ta femme,

Qui la tortures,

Et ensuite la répudies avec « ses » vos enfants.

Haine ! Oui haine !

De toi qui baisse ton pantalon

Devant cette fille au cou long.

Pédophile, haï par ma race,

Rapace, vorace, juste cocasse.

Haine ! J’appelle ma haine

Contre toi qui, sur mon peuple fâché, dégaines.

Oh haine de l’esclave ! Des dociles opprimés !

De toi qui, dans ton salon, médit de ma face

Insaisissable biface.

Haine, mon cœur en haine

Contre toute cette peine

Pour des moments obscènes

Haine de ce peuple virile

Qui fantasme sur une star vile.

Haï sois tu !

Toi qui sur la souffrance des autres s’est tu.

Haine de l’affamé, de l’opprimé

Contre toute cette rage comprimée ;

Contre le gargantua des miettes du peuple

Contre ces cellules que des innocents peuplent.

Haine du peuple de Guinée

Contre ces tueries que tu suis au diner.

Oh désespoir de race haïtienne

Césaire, Louverture, Déesse païenne.

Ma haine est pet de putois

Contre ces élections toujours décriées sur les toits.

Pauvre de moi et de ma race !

Violence ignorante et merdique

Dans notre espace politique,

Alors que le meilleur gagnera

Et le peuple vivra !

Maudit soit tout cet argent amassé

Et qui ne sert à aucune âme fracassé.

Dans cette vie fraîcheur

Dans l’autre chaleur

Le jour, voilée

La nuit, dévoilée

A la mosquée sous le soleil,

Dans les bars sous la lune merveille,

Voilé dévoilé, apparent caché

Gentil méchant, pauvre riche

Mën thiou ! Mën Thia !!!

Haine de ce continent désuni

Et que tout uni.

Peur d’être ensemble

Ou honte d’être semblable.

Ma haine insatiable…

Par Souleymane Ly

julesly10@yahoo.fr

mercredi 3 février 2010

HOMMAGE A MODOU BIRAME NDIAYE




A Ya Fatou Diouf, Maman Mariétou Ndao, Maman Awa Diarra, Souleymane,mon ami Matar(amitié vielle de 30 ans), Charles, Ameth, Ass, Waly, Mame Ass,Mbara, Beuz, Seydina, Khalifa, Dabakh, Bira, Kaba, Naby, toutes les filles de Modou Birame et à ceux que je n'ai pas mis et qui s'y reconnaitront, à ses petits fils et petites filles, à toi qui a perdu ton père, ton mari, ton ami...


Par Souleymane Ly


Julely10@yahoo.fr


77 651 65 05



Modou Birame Ndiaye est un sénégalais unique et par conséquent irremplaçable. Rares sont les individus qui croient tellement en une cause qu’ils construisent leur vie en fonction d’elle. Modou Birame était l’un de ces hommes exceptionnels.


Né en 1937 à Diagane, Modou Birame a fait ses études primaires à Kahone.


Comme tout jeune patriote, il fit son service militaire avant de servir dans la santé à Guinguénéo avant de poser ses valises à Oussouye, dans le sud du pays.


Brillamment admis dans le corps des assistants sociaux il va servir l’IRESS à Kaolack (dans le quartier Kasnack et Sara ensuite).


Il a fait partie des fiertés de la cité HlM Sara où il vécut avec sa famille jusqu’à son décès le 09 Juin 1992 suite à un accident de la route causé par un camion en panne sur la chaussée, et qui comme à leurs habitudes n’avait pas bien mis des triangles de signalisation.


Très jeunes que nous étions, la veille de son voyage qui ne le verra jamais revenir chez lui, il nous montrait le radiateur de sa voiture qui perdait de l’eau. Je revois ce moment, son chapelet à la main.


Ces injonctions à le rejoindre dans la mosquée, surtout pour la prière du crépuscule qui nous trouvait toujours sur le banc devant chez lui, résonnent encore dans ma tête.


Cet homme aura été pour nous un exemple de droiture, d’authenticité, d’honnêteté, d’intelligence, de passion et de piété.


Sa perte a laissé un grand vide dans nos cœurs et dégarni la ligne de front qu’il occupait si brillamment. Combler ce vide exigera l’abnégation de plusieurs : un seul individu ne pourra jamais le faire.


Je me suis toujours fait le serment de lui rendre hommage un jour ; aujourd’hui que mes textes sont lus par des milliers d’amis, je dédie à cet homme ce poème suivant pour qu’enfin ce serment lourd dans mon cœur s’allège et laisse la place à son image et ses vertus.






A Mon Père !


J’irai avec Hugo


Demain dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne


Prier pour toi. Vois-tu, je sais que tu l’attends.


Je plagierai Birago


Pour écouter plus souvent les choses que les êtres


La voix du feu s’entend.


Entends la voix de l’eau,


Ecoute dans le vent, le buisson en sanglots


C’est le souffle de Modou Birame.


Ce père n’est pas parti,


Il n’est pas loin


Juste de l’autre côté du chemin


Nous disant :


« Ce que nous étions les uns pour les autres,


Nous le sommes toujours ».


Tes enfants, de Souleymane à Dabakh


Tous crient à l’unisson « Modou Ya Bakh » !


Notre tam-tam ne résonne plus


Notre kora, pincé, plus


Notre voix aphone


Depuis qu’a sonné, ce 09 juin 92, ce téléphone


Nous annonçant ton départ


Sans crier gare !


Tes filles deviennent mères


Mer calme sans orage, l’aîné courage, les berce de sa tendresse


Dans leurs grands yeux malicieux, s’efface à jamais toute tristesse


Souleymane veille sur eux, les protège d’une vie amère.


Papa ! Papa ! Papa !


Je t’appelle et tu ne viens pas.


Ton absence est entrée chez nous,


Et notre voix, depuis, se noue


Intense douleur d’un fils qui perd son père.


Quand sonne l’heure où tout le monde espère,


Père Modou s’est tu


Milles prières, Milles lumières t’éclairent. Où es tu ?


Sans doute auprès du Seigneur.


Que l’eau bue, au milieu de ta cour, de ce canari,


Par les enfants des HLM en sueur,


T’accompagne au paradis.


Le temps est l’ennemi de ceux qui espèrent ;


Conservons au fond de nous le meilleur de naguère,


Le meilleur de Père Modou Birame


Père d’une extraordinaire grandeur d’âme


Socialiste, certains de tes enfants libéraux ;


Fervent Tidjane, dans ta famille le Mouridisme tout Haut.


Quelle leçon de démocratie !


Dans ce monde de péripétie.


Nous irons prier sur ta tombe


Avant que la nuit ne tombe.


Repose en Paix Père !


Par Souleymane Ly