jeudi 31 décembre 2009

Dans le Noir !


Dans le noir, mes fautes me reviennent

Mes cas de conscience me surprennent.

C’est dans le noir que j’avoue mes crimes

Et que je descends de mes cimes.

Dans le noir je suis le voleur, le violeur

….L’arnaqueur.

Dans le noir, je nargue mon avocat

De tous les crimes qu’on me reprocha,

…J’en suis l’auteur.

Dans le noir, je sens mes faiblesses,

Je me vide de ma hardiesse.

Dans cette obscurité, je vie mes horreurs

Je me débarrasse de mes honneurs.

Je suis le Président qui avoue ses incapacités.

Le mari qui palpe ses escapades adultérines.

L’élève, l’étudiant tricheur.

Le chirurgien de la fatale erreur.

Le politicien calculateur.

Dans le noir, je ne suis plus Monsieur Le.

Je vogue dans mes peurs,

Je repousse mes incertitudes.

Dans ce noir, je vois mon extradition,

Organisée comme une expédition.

Je suis le sans papier, le clandestin,

On me prive de mon destin.

Dans le noir, l’homme sans honneur.

Je prépare, pour le lendemain, mon bonheur.

Dans le noir, j’escalade ton balcon

Je m’en vais jouer au con

Pour mon peuple je cherche l’issu

Dans ma tête, la nébuleuse fait tissue

Dans le noir tous les chats sont gris

Lumière ! Je suis aigri.

Souleymane LY

77 651 65 05

Julesly10@yahoo.fr

samedi 19 décembre 2009

Un cas rapide

-Parcelles !22 ! Parcelles ! 22 ! …

L’apprenti s’égosille pour trouver le maximum de clients pour son car ; il le remplit à ras bol en y mettant des personnes qui acceptent de se mettre debout, les unes derrière les autres.

Deux coups sur la carrosserie et c’est le départ.

Trois femmes assises cote à cote :

- T’as vu le grand boubou de Khady ? Il est joli dé !

- Moo ! laisses tomber ; elle l’a emprunté. J’en suis certaine. Je reconnais la couture ; c’est celui de Fatima, sa cousine, tonne l’autre.

- Ah bon ?! Dieu sait que je croyais que c’était pour elle, tellement elle se sentait à l’aise dedans.

- Elle a l’habitude celle là ! Tu sais, même pour ce baptême là il a fallu que son mari puise dans la caisse de la boîte qu’il dirige. Prête l’oreille rék ! il sera bientôt en prison.

- Je ne comprends plus. Elle t’a pourtant offert dix mille francs que tu as acceptés en chantant ses louanges.

- Je ne lui ai rien demandé moi et ensuite tu ne connais pas la meilleure ? Son mari me court derrière ; Le portable que tu vois là, c’est lui qui me l’a offert. On se rencontre souvent : « Défar bamu bakh ! »

- Soubhanala ! Toi la meilleure amie de sa femme ? Thiey Goor gni !

- Amie mo fi diékh ! Si lui ne refuse pas alors moi non plus !

Au fond du car, trois enfants en blouse bleue : des élèves. Ils ne peuvent plus se retenir ; ils dorment comme des anges ; Fatigués ?

Oh que oui ! Ils quittent tous les jours la banlieue pour rejoindre leur école au centre ville. Ils se réveillent à 4h30 du matin pour être à l’heure. Combien d’école dépassent-ils ? Ont-ils le temps d’apprendre à la maison ? Mangent-ils bien la journée ? Ne sont-ils pas courtisés par des adultes pervers ?

Kham ! Je ne sais pas !

- Eh toi au fond pass yow ! crie l’apprenti.

- Combien de fois ? répond le client interpellé.

- Tu m’as rien donné ! crie l’apprenti.

- Oh que si ! au nom de Dieu ! Barké Serigne…… !

Dieu sait qu’il n’a rien donné et il ne se pose aucune question pour jurer sur le saint coran qu’il s’est déjà acquitté du prix du trajet. Que neni !

- Chauffeur arrêtes toi ! tonne subitement une jeune fille qui depuis le départ snobe tout le monde en reprenant la chanson qui passe dans ses écouteurs bien vissés dans ses oreilles.

- On m’a volé mon téléphone !

Certains clients murmurent en sourdine « Niaw ! bien fait pour toi. »

- Donnes le numéro que je te bipe !

- 77 651 60 0…

Le « galant » Monsieur qui du reste, depuis le début du trajet, n’a cessé de jeter des regards furtifs sur une partie intime de la fille que ne peut cacher un jean au fond trop étroit, compose le numéro et porte le téléphone à son oreille ; A l’expression de son visage on devine bien que ça sonne à l’autre bout.

- Allo ! Bonjour ! Le téléphone que vous avez a été volé ! Ya !!!!!

Notre « gentleman » raccroche aussitôt et baisse les yeux.

La demoiselle l’interpelle :

- Qu’est ce qu’il a dit ? Vous l’avez eu ?

- Il m’a insulté avant de me demander de te dire d’aller en chercher un autre. Apparemment il est descendu depuis longtemps.

Les commentaires vont bon train dans le car. Chacun y va de son analyse et de son expertise.

Le pont de la patte d’oie, une longue file de voitures attendent. On klaxonne, on injurie, on crie, on balance les bras.

Le chauffeur manœuvre pour se frayer au chemin.

Un coup de sifflet strident : c’est l’agent de police préposé à la circulation.

Le conducteur s’arrete. Un bref salut et l’agent récite comme une litanie :

- Permis, carte grise, vignette, visite technique !

Le chauffeur s’exécute en tendant des pièces au policier. Ce dernier s’éloigne du car sans faire cas du nombre de clients debout dans le car ni des lumières défectueuses.

L’apprenti descend de la marche pied et tend un billet de 1000 FCFA au policier qui lui rend les papiers.

C’est à nouveau le départ. Le conducteur énervé par l’attitude du policier appui sur l’accélérateur et va direct sur les rampes du pont. Il veut s’arrêter. Impossible !

Le car fait un saut périlleux et pique le nez du haut du pont.

Malheureusement il n’avait pas de frein.

C’est le noir !

Souleymane LY

77 651 65 05

julesly10@yahoo.fr