samedi 12 septembre 2009

A qui la faute?









Connais tu la position du fœtus ? Non ?

C’est dans cette position, pieds et mains liés, que mon père m’a mis sous le chaud soleil, près du puit après m’avoir roué de coups et arrosé avec l’eau du canari

Qu’ai-je fait pour mériter une telle punition ? Mon papa en me frappant me donnait l’impression d’être une autre personne tellement il mettait de la violence dans ses coups.

Ce n’est peut être pas parce que mon ballon a renversé la marmite du voisin que papa est dans cet état là. Aussi loin que je puisse remonter dans mes souvenirs, c’est la seule « bêtise » que j’ai eu à faire dans la semaine ; Si c’est cela, à qui la faute ? Nous n’avons pas de terrain de jeux dans le village.

Au fait, j’allais l’oublier ; je suis le cadet d’une famille de douze enfants mais je vis seul avec mes parents. Les onze autres ? Mon père s’en est débarrassé en leur octroyant des séjours à durée illimitée chez mes oncles, mes tantes et chez de lointains parents.

Lui, le pater se lève tôt pour aller à son travail ; du reste ce qu’il dit être son travail. Son job est de se retrouver avec ses paires sous l’arbre à palabre du village jouant à la dame et discutant à longueur de journée. A midi, il revient à la maison prendre un repas pour la préparation duquel il n’a donné aucun sou. C’est maman qui se débrouille pour faire bouillir la marmite : vendeuse de cacahuètes, lavandière, pileuse de mil…Elle est femme « douze métiers », ma mère ; A qui la faute ?

Elle a été donnée à mon père à ses treize ans donc inutile de te dire qu’elle n’a jamais eu le temps de s’épanouir, de prendre soin d’elle ; Elle a vieilli avant ses vingt ans ; elle qui a passé la moitié de sa vie conjugale à faire des allez et retour entre la salle d’accouchement et la maison. En moyenne, une fois par an. A qui la faute ?

Les onze premières fois, mon père est revenu à la maison mécontent et se demandant comment il a pu faire pour épouser une femme incapable de lui donner un garçon. Il en pleurait même mais à qui la faute ?

Ouf ! disait ma mère à ma naissance « Ndaax yalla ma nopalu » !

Je suis le seul garçon dans ma famille.


J’en oublie même que je suis là ligoté sous un soleil de plomb attendant le retour de mon père. Ce dernier revient vers le crépuscule et lance à ma mère :

- Cette nuit, tu lui prépares sa valise. Je l’amène à Dakar chez un ami ainsi « Gnou nopalu ». Je suis fatigué de nourrir un enfant de dix ans qui ne me sert à rien.

Ma mère ne pipait mot. Ici dans notre village les femmes n’ont pas droit au chapitre ; elles n’osent même pas appeler leur mari par leur nom : c’est un sacrilège !

Le lendemain ,à l’aube, nous prenons lui et moi la direction de la capitale ; voyage mouvementé fait de péripéties dont je t’épargne les détails.

Nous arrivons dans une maison lugubre et dont le décor est pittoresque : de nombreux petits enfants dans la cour, des pots de tomates vides en quantité sur industrielle et des tablettes pour apprendre le coran.

Tout l’après midi mon papa et le maître des séants ont discuté sans faire attention à nous et la nuit ils se sont retirés en me laissant dormir avec les autres enfants ; je n’ai pas fermé l’œil de toute la nuit : je pensai à ma mère ! c’est durant cette nuit que je me suis rendu compte que je ne lui ai jamais dit combien je l’aime alors que mon cœur est rempli d’amour pour cette femme ; A qui la faute ?

A l’aube mon père est retourné au village sans me dire au revoir et c’est le maître des lieux qui vient me voir dans mon coin pour m’expliquer pourquoi je sui là et ce que je devais faire chaque jour. Ce que j’en retiens est que je dois lui donner un versement de cinq cents francs CFA par jour et que je dois arpenter les rues de Dakar pour les trouver ; Pour manger nous devons nous contenter des restes que l’on nous donne par ci et par là. A qui la faute ? Nos parents qui nous ont laissé ici ne font aucun geste pour nous nourrir.

Dans la rue, les personnes qui vous font l’aumône murmurent des litanies inaudibles et crachent plusieurs fois sur la piécette avant de vous la tendre : « AmYalla diox la » ! (Tiens, de la part de ton Seigneur).

Ah bon ! C’est de cette manière que le Seigneur donne ? Non !

Il m’est arrivé, plusieurs fois, d’avoir envie de dire à la personne qui tend la pièce de la garder car j’ai tellement peur que la maladie ou le mauvais sort qu’il essaie d’éloigner de lui se rapproche de moi qui accepte ce qu’il me tend. Mais je n’ai pas le choix car c’est cinq cent francs ou des coups de fouet.

C’est ainsi que je passe ma première année dans cette maison et on ne peut pas dire que j’en ai appris sur le coran : je suis à la cinquième sourate.

Et Dieu sait que j’en ai bavé dans cette maison, Serigne ne rate aucune occasion pour nous punir : vous frapper, vous brûler les genoux avec des tisons…Il sait tout faire.

Tu vas peut être me suggérer de fuguer et de retourner au village ?

Je l’ai fait à deux reprises et à chaque fois, c’est mon père qui me ramène après m’avoir fouetté. La dernière en date, il a menacé ma mère de la répudier si jamais je reviens chez lui.

Je reviens chez le marabout et endure ses mauvaises humeurs, stoïque.


N’en pouvant plus, je le quitte de nouveau pour aller trouver refuge chez les « Fakhmans » (fugueurs ou enfants de la rue) qui ont leur base sous le pont de la Patte d’Oie.

J’y ai tout appris : voler, fumer, inhaler du diluant ou de la colle forte, boire de l’alcool, forniquer…

Personne de ma famille ou de celle de mon marabout n’a cherché à me retrouver ; mon papa l’avait dit : je ne sers à rien !

A coté de la route où l’on avait élu domicile, je pouvais voir tous les matins les enfants qui allaient à l’école accompagnés ou non d’un membre de leur famille. C’était les moments les plus difficiles de mon existence : Ces enfants méritent-ils d’aller à l’école plus que moi ?

N’ont –ils pas dit que l’école est obligatoire et gratuite ? Pourquoi ne font ils rien pour me tirer de là ?

Le « Fakh land » commençait à devenir l’enfer pour moi : des garçons plus forts que moi me violent chaque nuit, me battent, me font voler…

J’ai vécu, ainsi, dans la peur, l’ignorance totale des valeurs cardinales qui sous-tendent une société de gens de bien ; jusqu’au jour où ce qui devait arriver arriva : j’ai été épinglé pour vol en réunion avec usage d’arme blanche.

Et depuis, je moisis ici dans la prison qui n’est rien d’autre qu’une réplique de la vie dans la rue. A qui la faute ?

Tu diras à ma mère que je l’aime et que je pense à elle.


PS : Si tu croises mon papa, respectes le et dis lui que je l’adore : c’est mon père !

A qui la faute ?



Souleymane Amadou LY

77 651 65 05

Julesly10@yahoo.fr





mercredi 9 septembre 2009

Chatter avec mon professeur

Aujourd’hui j’ai fini mon cours de philosophie un peu tard. Le professeur très consciencieux a jugé nécessaire de nous retenir en classe pour terminer le chapitre entamé étant entendu que les examens approchent et que les grèves interminables, tantôt des élèves, tantôt des enseignants eux-mêmes, ont fini de torpiller le quantum horaire.

Je suis arrivé à la maison au crépuscule.

Dring ! C’est mon téléphone qui sonne : c’est un nouveau message ; Je ne connais pas ce numéro néanmoins j’ouvre la boite de réception et je lis :

- Bsr, té b1 arrivée ?

Moi :- wi, merci. C ki ?

- ah tu coné pas ce numéro ?

Moi :- Non

- C Mr Diop

Moi :- Mr Diop ? mon prof de philo ?

- wi. Tu en coné dotre ?

Moi :- ah ok je vois. Merci de tinkiéter. S8 b1 arivé

- tu m mank

Moi :- Merci

- c tt ce k tu répds ?

Là je prends mon temps ; je pose mon téléphone sur le lit et je me laisse tomber sur ce dernier. Les yeux rivés sur le plafond, je reste pensive. Que me veux Mr Diop ? Celui que j’estime beaucoup et pour qui je suis prêt à suivre tous les conseils ; n’importe lesquels.

Dring ! Un autre message : - tu réponds pas ? Sache k j tm et k j n cesse de penser à toi.

Celui là je l’ai reçu comme un coup de massue.

Que faire ? En parler à Papa ? Non ! Lui ne m’écoute jamais. Il a toujours dit tout haut à celui d’entre nous qui osait l’interpeller : « taloumala ! » (Je n’ai pas ton temps !)

Maman ? Elle aussi non ! Elle ne se concentre que sur son commerce.

A dire vrai, je n’ai aucune connexion avec mes parents. Ils nous logent, nous habillent, nous nourrissent et Basta !

Dring ! Un autre message de Mr Diop : - bne n8 et rêve de moi !

Je ne réponds toujours pas ; je me dis qu’il s’est trompé. Je m’affaire, je dors et j’oublie.

Le lendemain, je retourne à l’école, la peur au ventre. Fasses Dieu que Mr Diop ne vienne pas à l’école.

Dans la cour, je le cherche des yeux ; je regarde partout, les coins et les recoins.

- Bonjour me susurre une voix dans le creux de l’oreille.

Je sursaute ! C’est lui, Mr Diop.

- Bonjour, lui répondis je.

- Je vais être clair avec toi Mademoiselle, je t’aime et je veux sortir avec toi. Tu peux refuser mais ton refus sera synonyme de coup d’arrêt pour la poursuite de tes études. Je te donnerai un zéro pour tout travail que tu me présenteras et au Bac je ferai tout mon possible pour que tu ne réussisses pas. Réfléchis y ! Si toutefois tu es d’accord, retrouve moi chez moi cet après midi à dix huit heures.

Sur ce il presse le pas et entre dans la salle des professeurs me laissant plantée là ahurie.

A l’école aucune structure n’est mise en place pour gérer ce genre de problème et écouter les élèves qui sont dans ce genre de situation.

Dois je aller à ce rendez vous ? Non ! Je n’irai pas. Mais si je m’y rends pas il va ruiner mon avenir ; il l’a bien dit. Quel dilemme pour un élève de mon âge !

Je vais en classe et je suis calmement mes cours. Si je pouvais arrêter le temps jamais 18 heures ne sonneraient. Dommage je n’ai pas ce pouvoir.

A 18 heures, je me rends chez le prof toute inquiète. J’entre dans sa chambre et je le trouve en petite tenue. Mon sang ne fit qu’un seul tour. Je n’ai jamais vu celui que je déifiai dans cet accoutrement même dans mes rêves les plus fous.

- Tu as peur de moi ? Mets toi à l’aise. Ici, je ne suis plus le professeur mais l’homme A. Diop.

Il entra dans sa cuisine et en ressortit avec un verre rempli de boisson qu’il me tendit. Je la bue d’un seul trait ; Ensuite plus rien.

Je me réveille et il fait déjà nuit. Je me rappelle de rien mais je constate que j’ai mal au bas ventre et que j’ai du mal à marcher.

A la maison motus et bouche cousue ; je ne pipe mot à personne.

Il en fut ainsi encore et encore. On se retrouvait chez lui et il usait toujours de son pouvoir de persuasion, de l’ascendance qu’il a sur moi qui suis son élève, pour me violer.

Il a tenu parole ; je n’avais plus besoin de travailler récolter la meilleure note en classe. Mes camarades n’étaient pas dupes ; ils savaient bien qu’il se passait quelque chose entre le prof de philo et moi. Les plus pervers écriront sur tous les murs de l’école : « Mr Diop et F.D sortent ensemble ».

Moi cela ne me gênait plus : « yakhou na té Mr Diop moma yakh » !

Le jour des anticipés de philo approchait inexorablement et moi j’avais d’autres préoccupations : j’avais des nausées, des palpitations et la nuit je dormais pas. Je vomissais à tout vent.

Mon père, inquiet, s’en ouvra à ma mère qui ne sut apporter aucune réponse. Ils se décidèrent de m’amener chez le médecin pour une consultation.

Comme « Lou dé rék, khégne sou neubé » et « lou teuweu kham dafa yagoul », le médecin diagnostiqua une grossesse trois mois ; Déjà !

Comment est ce possible ? Qui en est l’auteur ?

C’est cette dernière question à laquelle je ne voulais pas répondre qui a fait sortir mon père de ses gongs :

- Fille fornicatrice ! Demain à la première heure tu quittes ma maison.

Ma mère, elle, ne cessa de pleurer et de se lamenter :

- Euy, louma déf Yalla ? (Qu’ai-je fait au bon Dieu ?)

Moi, je m’emmure dans un mutisme total sachant ce qui me reste à faire. La nuit, je me retire dans ma chambre et me mets sur ma table de travail afin d’écrire une missive à mes parents :

« Papa ! Maman !

Je sais que vous êtes très déçus par mon attitude et que jamais vous ne me

pardonnerez.

L’auteur de ma grossesse n’est rien d’autre que mon professeur de philosophie

Mr Diop. Cependant, je vous demande de ne pas aller le voir car il va nier ;

c’est un lache. Porter plainte contre lui ne changera rien ; il purgera sa peine et

sera élargi Au bout de cinq pauvres années sans pour autant que ma douleur

ne s’estompe.

Racontez mon histoire aux enfants, aux jeunes pour qu’ils sachent et pour qu’ils

soient suffisamment armés contre ce genre de charognards.

Ensuite ouvrez vous à mes petites sœurs et frères pour qu’ils osent vous parler

leurs problèmes.

A Mr Diop, seul mettre ma mort sur sa conscience peut lui pourrir la vie et celle

de tous ceux de sa race qui ont investi nos écoles primaires, nos collèges, nos

lycées et même nos « daaras » (écoles coraniques) pour voler la vie à des

filles et garçons innocents avec une impunité déconcertante.

Je vous demande pardon de prendre sur moi la responsabilité de mettre fin à mes

jours cette nuit. Papa, demain je quitterai ta maison mais ce sera les pieds

devant.

Je vous aime. Embrassez mes frères et sœurs de ma part et prenez soin d’eux.

Adieu ».

Toi aussi tu peux faire quelque chose. Dénonce et combat !

Souleymane Amadou Ly

Julesly10@yahoo.fr

77 651 65 05

lundi 7 septembre 2009



Silencieux Carnage

Fama Niane ou Maïmouna Dione, peu importe le nom ! Le fait est qu’elles sont des femmes sénégalaises tuées et découpées en plusieurs morceaux.

Comment est ce qu’un homme peut-il regarder une femme, la tuer de sang froid et prendre tout son temps pour jouer au boucher avec le cadavre ?

A-t-elle crié ? A-t-elle lutté ? T’a –t-elle supplié de la laisser vivre et voir grandir ses enfants ?

Comment en sommes nous arrivés jusqu’ici ? Que faisons nous pour arrêter tout cela ?

Autant de questions que l’on se pose.

Je m’indigne et toi avec moi devant une violence aussi absurde, insensée, froide et gratuite.


Ô toi sénégalais ! Tes femmes, tes sœurs, tes filles, tes nièces ne sont plus simplement violées et tuées mais aujourd’hui on les décapite, on les dépèce.

Quand les mangera-t-on ? Et à quelle sauce ?

Nous assistons à ce carnage, silencieux alors qu’on nous vole nos femmes sous notre nez.


Quels sont les mobiles ?

Sacrifice humain ? Non car aucun objectif au monde ne mérite un tel sacrifice ; Même remplacer Obama à la tête des Usa n’en vaut pas la peine.

Ô sénégalais ! La pirogue est entrain de chavirer, ressaisissons nous !

Diantre ! Où sont passés nos chefs religieux ? Le troupeau est entrain de s’égarer et ils oublient leur rôle de guide.


Si rien n’est fait, ça va péter ! « Ma gnak souma, ça va péter » !

Crois tu que décapiter… un nouveau né restera impuni ? Jamais. La punition n’épargnera ni l’auteur ni les gens qui vivent sur le sol théâtre de ces agissements : « Ay dou yém ci bopou borom » !

Nous sommes devenus, reconnaissons le, un peuple de violence, de mensonge, de combine, de laisser aller et nous devenons de jour en jour plus miséreux. Personne ne sera épargné.

Donnons nous la main et revenons à la raison car l’heure est grave. « Hocher la tête ne fait pas avancer la pirogue » il nous faut tous ramer dans la même direction, accepter de suer pour les générations futures, nous atteler à transmettre à la postérité un Sénégal débarrassé de toutes ces peurs.

« Sénégal kén meunou ko khar niaar » mais nos femmes « mom » on peut les mettre en 13 morceaux ? Le carnage est trop silencieux.

Agissons !


Souleymane Amadou Ly

77 651 65 05

Julesly10@yahoo.fr